On décrit souvent les adolescents de cité comme enfermés dans des ghettos. Ils auraient peu de contacts avec les citadins d’un autre milieu social et résidentiel que le leur. Grandir dans un quartier ségrégué entraînerait-il l’acquisition de normes et de comportements spécifiques néfastes à leur insertion sociale ? Ce livre questionne ces clichés, en s’intéressant aux effets des mobilités en dehors du quartier sur la socialisation et la construction identitaire des adolescents des cités franciliennes.Ont-ils des pratiques de mobilité si différentes de celles des autres adolescents? Quelles épreuves spécifiques affrontent-ils au cours de leurs déplacements ? Que s’y joue-t-il de décisif pour eux ? L’anonymat urbain permet de mettre à l’épreuve les habitudes et d’expérimenter de nouvelles manières d’agir. Si les mobilités sont socialisantes, elles sont toutefois fortement déterminées par des dispositions incorporées dans la famille ou le quartier de résidence. Les différenciations sociales, spatiales et de genre à l’intérieur des cités se traduisent par des manières d’habiter très différentes, caractérisées par des pratiques de mobilité et des ancrages résidentiels spécifiques. Les expériences de mobilité contribuent parfois à modifier les façons d’agir des adolescents, lorsqu’ils se confrontent avec succès aux épreuves de la co-présence avec les autres citadins. Elles entraînent au contraire un repli sur le quartier lorsqu’elles sont vécues comme trop éprouvantes, en raison du stigmate social et ethno-racial dont ces adolescents se sentent porteurs.