Soigner, moraliser et contrôler : l’injonction de soin au carrefour de finalités plurielles - Inria - Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2020

Soigner, moraliser et contrôler : l’injonction de soin au carrefour de finalités plurielles

Résumé

Sans abandonner les figures de dangerosité que constituent le « fou » et le « junkie », les paniques morales se sont déportées sur les délinquants sexuels à partir des années 1990, plus particulièrement sur les pédophiles, diabolisés à la suite de faits divers ayant défrayé la chronique 1. Après des siècles de relative indifférence, sinon quelques périodes de tolérance, les pouvoirs publics, les médias et l'opinion s'alarment alors d'une progression du phénomène, bien qu'elle s'explique essentiellement par un accroissement du taux de plainte, les statistiques de police ayant doublé en vingt ans (7 142 infractions constatées par les services de police en 1974, 19 187 en 1994). Les délinquants sexuels représentaient 5% de la population écrouée en 1980, 10% en 1990, 14% en 1996, 25% en 2001, avant que leur part ne décroisse ces dernières années (12,5% en 2014). Assimilés à des « prédateurs », ces condamnés ont été présentés comme particulièrement dangereux, inévitablement récidivistes, mais aussi comme des « malades » qu'il fallait traiter et surveiller sans discontinuer. A la suite de plusieurs rapports associant des responsables politiques, des universitaires, des professionnels de la justice et de la santé 2 , la loi du 17 juin 1998 instaura une nouvelle peine complémentaire, le suivi sociojudiciaire (SSJ), dont les effets démarrent à la libération du condamné (art. 131-36-1 et suivants du Code pénal). Celui-ci peut comprendre une injonction de soin plus contraignante que l'obligation classique de l'article 132-45 du Code pénal. Toute défaillance du condamné peut se traduire par une nouvelle peine privative de liberté, à l'origine de deux ans en matière délictuelle, cinq ans en matière criminelle. Sur le plan institutionnel, le législateur a placé au coeur du dispositif un « médecin coordonnateur », une sorte de « passeur de frontières » (« boundary spanner ») 3 chargé de l'interface entre le juge de l'application des peines et le thérapeute. Pour protéger le secret professionnel, tout en intensifiant le droit de regard des JAP et des agents de probation sur l'espace des soins, il lui revient de vérifier l'assiduité du condamné et le bon déroulement du suivi, puis de transmettre aux magistrats les éléments nécessaires à leurs contrôles.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

halshs-03500062 , version 1 (21-12-2021)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-03500062 , version 1

Citer

Virginie Gautron. Soigner, moraliser et contrôler : l’injonction de soin au carrefour de finalités plurielles. Les mots du droit, les choses de justice, Mélanges en l’honneur de Jean Danet, 2020. ⟨halshs-03500062⟩
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